Gourbesville, les américains dans la Bataille de Normandie
En ce mois de juin 1944, Gourbesville est une paisible bourgade normande occupée par des membres du 191ème détachement hospitalier, 91. Infanterie-Division. L'école communale a été transformée en poste de secours par les allemands, et ce dispensaire sera bien utile pour les événements qui vont se dérouler dans la nuit du 5 au 6 juin 1944.
La soirée se couvre soudain d'un vrombissement dont l'ampleur grandissante trahie l'approche de formations de C-47. Les avions vomissent leurs nuées de corolles, au bout desquelles se balancent les troopers de la 82nd US Airborne Division. Des parachutistes de la I Compagny, 508th Parachute Infantry Regiment, tombent au milieu du village du Cotentin, quand d'autres atterrissent plus à l'Ouest, vers Saint-Sauveur-le-Vicomte. Dans le poste de secours, le chirurgien accueille ses premiers patients.
La bâtisse utilisée comme poste de secours par les allemands. | Des soldats des deux camps y furent soignés. |
Le Private L. B. Lewellen, I Co/508th PIR, atterri dans un champ. Après avoir assemblé son arme, il remarque trois allemands. Un échange de tirs débute. Une balle allemande fracasse son fusil et le blesse gravement à la main gauche. Lewellen essaie de se carapater à travers champ mais est à nouveau touché à la jambe et fait prisonnier.
Arrivé au poste de secours, le médecin lui annonce que sa main est trop abîmée. L'amputation s'impose. Lorsque le parachutiste se réveille, il n'a plus que sa main droite mais sa jambe est soignée. Il voit bientôt arriver un officier du 507th PIR. Le Lieutenant-Colonel Gordon K. Smith a atterri au Nord de Gourbesville à 2h40, puis fut blessé au bras droit et au flanc. Transporté puis opéré à l'infirmerie, Smith reprend ses esprits et remarque le para Lewellen à ses côtés. L'officier rencontre le médecin et la discussion s'engage entre les deux hommes. Le chirurgien parle très bien anglais et explique qu'il est un vétéran de la campagne d'Afrique du Nord. Il y fut capturé par les américains, mais eut la permission de soigner ses camarades allemands blessés. Depuis, le médecin se jura de soigner les captifs américains comme lui-même fut traité en Afrique.
Les vétérans Smith et Lewellen ont été faits citoyens d'honneur du village. | Le monument commémoratif dédié à la 82nd US Airborne Division et à la 90th US Infantry Division. |
L'infanterie américaine libère Gourbesville.
A l'Est, les américains sont bloqués au pont de La Fière par le Grenadier-Régiment 1057. Le 9 juin, la 82nd parvient à briser les défenses allemandes sur la chaussée menant à Cauquigny. Le matin suivant, le 357th régiment, 90th Infantry Division, produit une attaque, mais cette dernière s'essouffle vers 12h40 aux environs du hameau des Landes. Les jeunes recrues ne sont pas habituées à combattre dans le front particulier que constitue le bocage normand, favorable aux défenseurs. Vers 15h30, une nouvelle poussée américaine se heurte à la résistance ennemie. Le 11 juin à 8h, le troisième bataillon mène une nouvelle offensive en direction de Gourbesville, sans succès. Jusqu'au 13 juin, les GI's ne peuvent percer les lignes allemandes. Un chemin creux gagne même le sinistre sobriquet de « Coffin Corner », le coin des cercueils. Le même jour, le 357th accueille à sa tête un nouvel officier, le Colonel Sheehy. L'unité repart à l'assaut et atteint enfin la route d'Amfreville-Gourbesville. Néanmoins la nuit tombante ordonne aux GI's de stopper leur marche.
Le 14 juin, l'artillerie supplante un bombardement aérien manqué, et vers 19h30, les américains entrent dans Gourbesville mais sont vite refoulés par l'occupant. Dans la matinée du 15 juin, le 357th se repli à l'Est aux abords d'Amfreville. Puis à 21h30, son troisième bataillon lance une nouvelle offensive vers Gourbesville. Enfin à 23h30, le QG de la 90th ID reçoit un message : Gourbesville est libéré.
Le soldat inconnu ... enfin reconnu
D’où vient la plaque apposée sur le monument aux morts dans le cimetière communal ? Qui est ce James R. Hattrick honoré au milieu des tombes ? Les habitants firent des recherches, bien aidés par les archives militaires américaines et le témoignage d'un médecin allemand. Et finalement ils trouvèrent une explication à cet hommage. Hattrick était membre de la I compagny, 508th PIR, et toucha terre près du château. S'apercevant que les environs grouillaient d'allemands, il se cacha dans un tas de bois. Notre homme aurait pu rester tranquille, mais il décida de faire feu sur les feldgraüs. Pensant qu'ils étaient ciblés par un franc-tireur normand, les allemands convoquèrent le maire Mr Delaune. Leur ordre était limpide : si les tirs perduraient, le maire serait fusillé. La désagréable entrevue n'était pas terminée que le commandant allemand s'écroula, tué d'une balle. Cependant ce tir fut aussi fatal à Hattrick. Les allemands localisèrent l'origine du coup de feu et mitraillèrent le tas de bois, occasionnant une blessure fatale au trooper embusqué. Il fut transporté à l'infirmerie ou il décéda. Son corps fut alors inhumé dans le cimetière communal.
Sa dépouille fut ensuite récupérée le 28 juin puis déposée dans le cimetière militaire provisoire N°2 de Sainte-Mère-Eglise, Puis en 1948, elle fut rapatriée aux Etats-Unis. James R. Hattrick repose depuis à Charlotte en Caroline du Nord. Quant à la plaque placée sur le monument aux morts, elle aurait été mise là par Mr Delaune.
James R. Hattrick (Find a grave)