Objectif Cherbourg pour les américains en Normandie
C’est le secteur se trouvant le plus à l’Ouest des 5 plages du débarquement et aussi l’un des plus stratégique de cette opération. Il courre de la rive gauche de la Vire jusqu’aux dunes de Varaville.
Les défenses allemandes du secteur
2 divisions d’infanterie sont présentent sur ce secteur :
- la 709. Infanterie-Division : commandée par le général Von Schlieben, cette division statique d’occupation à une combativité relative puisque sa moyenne d’âge est de 36 ans en 1944. Elle fut renforcée en octobre 1943 par le 919e régiment d’infanterie. Malgré tout elle ne comporte le 6 juin 1944 que 12 000 combattants qui n’ont jamais connus les combats.
- la 91e Infanterie Division, sous les ordres du Général Wilhelm Falley. Ces troupes sont elles aussi âgées (35 ans) et comptent 7 000 hommes. Elle est ici affectée à la surveillance du l’Atlantikwall entre Valognes et Carentan.
- la batterie de Crisbecq et ses 3 canons de 210 mm d’une portée de 27 km et un canon de 150 mm ( photo de droite )
- la batterie d’Azeville et ses 4 canons de 105 mm
Les troupes de débarquement
Utah Beach est réservée aux forces américaines du 7th corps commandé par le général Collins. Son but est la prise des fortifications du littoral par la 4th US Infantry Division (composé du 8th, 12th et 22nd régiments) du général Barton qui est représenté par le célèbre général Théodore Roosevelt, cousin du président américain de l’époque (ci dessous).
Les objectifs alliés du 6 juin 1944 :
Les objectifs sont dans un premier temps de prendre position sur les routes tout en faisant jonction avec les forces aéroportées qui seront larguées dans la nuit du 5 au 6 juin (Voir les paras du D-day ). Il est important de savoir que si l’un des 5 secteurs connaît un fiasco voir même la totalité, l’ensemble des troupes devra se reporter sur Utah…
Le but à moyen terme est de prendre le port de Cherbourg à revers.
A l’aube les troupes débarquent
Au large 19 navires mettent en batterie leurs gros calibres. La force U commandée par l’Amiral Morton Deyo basé sur l’USS Tuscaloosa va entrer en action afin de pulvériser ce trop médiatique mur de l’Atlantique. L’USS Nevada se charge de la batterie d’Azeville, l’USS Quincy cible la batterie de St-Marcouf, le reste de la flotte s’occupant des points d’appui sur la plage et des postes de campagne plus en arrière. A 5h50, les cris stridents des lourds obus de marine déchirent le ciel et traumatisent les défenseurs teutons. Trente minutes plus tard, le calme revient, la poussière redescend. Mais l’accalmie se fait courte, car 300 bombardiers de la 9th US Air Force sont en approche. Ils ouvrent leurs soutes à munitions sur les abris allemands, pendant que les péniches d’assaut se frayent un passage dans les creux des vagues.
Insigne de la 4th Infantry Division
Le Nevada ouvre le feu en direction d'Utah Beach, notamment sur la batterie d'Azeville (US Nationales Archives)
L’attaque amphibie américaine connaît dès le début une série d’erreurs qui se révèleront par la suite un atout considérable. En effet, au-delà du fait que la majorité des troupes aéroportées est dispersée dans le Cotentin et que l’attaque sur les plages (nommées pour l’occasion en 2 sous-secteurs Uncle red et Tare green) débute à 6H30, les américains se retrouvent sous une brume causée par les bombardements navals et aériens. Ils subissent aussi un fort courant marin, le Norois, qui emmène les barges face aux dunes de La Madeleine, à 2 Km de l’endroit où elles doivent accoster. Cette méprise s’explique aussi par le fait que le patrouilleur de tête a sauté sur une mine, ses précieuses indications ont donc manqué pour localiser la zone d’accostage.
Ironie du sort, les 620 soldats à bord des 20 LCVP de la première vague se retrouvent devant le poste de combat ennemi du Lieutenant Jahnke. Les 44 défenseurs du point d’appui ont souffert lors des bombardements alliés préalables à l’invasion. Ils tentent de juguler l’afflux des GI’s, mais ils ne peuvent efficacement s’opposer au débarquement avec leurs 2 mitrailleuses et un seul mortier valide. Ils tentent alors de se servir de leurs Goliaths, petits chars téléguidés chargés de 100 kilos d’explosifs, mais aucun ne fonctionne.
Dans ces premières troupes à fouler le sol normand se trouve le cousin du président américain alors en exercice, le Brigadier Général Théodore Roosevelt. Du haut de ses 56 ans et malgré son arthrite et les réserves de son supérieur le Général Barton, l’officier a tenu à être avec ses hommes dès le début de l’attaque. Alors qu’il arpente la plage sa canne à la main, il s’aperçoit de la bévue de la marine. Une seule sortie, la N° 2 vers Sainte-Marie-du-Mont, est praticable pour les véhicules. Qu’importe ! La 4th Division commencera la guerre à partir de ces dunes ! Roosevelt s’avance, pendant que les soldats se ruent vers le mur antichar. Ils ont environ 360 mètres à couvrir depuis les péniches avant de se trouver en relative sécurité à couvert du mur. Pendant leur périlleux trajet, ils sont la cible d’armes automatiques et des tirs d’artillerie des batteries d’Azeville et de St-Marcouf, au nord-ouest, ainsi que des positions de campagne basées aux abords de Ste-Marie-du-Mont à 4 kms de là.
Les hommes débarquent sur Utah. Sur la plage des carcasses d’engins gîsent.
De l’autre côté du mur, les occupants du WN 5 tentent de résister, mais c’est une cause perdue. Tous leurs moyens de communication sont anéantis. Après quelques minutes, les tirs provenant du point d’appui cessent et les GI’s peuvent investir les lieux. Franz Lanterbach continu son récit : "La grande supériorité ennemie l’emporta sur notre défense malgré notre vive résistance. Le sort des rescapés fut la captivité. Ensuite, lorsque les obstacles antichars furent détruits à coups d’explosifs par les sapeurs du génie américain, les prisonniers furent amenés entre deux réseaux de barbelés devant le mur des dunes."
Dès cette reddition, les GI’s s’attèlent à la progression vers la sortie N°1 vers 7h, soit 30 minutes seulement après le début de l’attaque amphibie. Même si ce secteur au nom charmant de la Madeleine parait accessible, la réussite de la mise à l’eau des chars amphibie D.D. permet tout de même de soutenir les fantassins ( 28 tanks sur 32 ont pu rallier la plage ) . Ainsi vers 7h45, les derniers points de résistance allemands ont totalement disparus du secteur d’Utah Beach. Les hommes du 8th régiment peuvent alors se porter vers les sorties 2, 3 et 4, ces deux dernières étant situées plus au nord. Mais la mort rôde toujours sur la plage, les obus tirés par les batteries en arrière s’abattent encore et fauchent les hommes du génie pendant que la troisième vague d’assaut arrive. Cependant vers 9h, pendant qu’à 15 kms plus à l’est sur Omaha Beach le carnage est à son comble, le Général Barton pose pied avec son état-major sur Utah Beach. Il constate que les choses évoluent favorablement et vers midi, le Général Omar Bradey qui commande la première armée reçoit ce message rassurant de son subordonné : "plages nettoyées, routes en construction, peu d’opposition..." A cet instant, 14 300 hommes ont déjà débarqué à La Madeleine.
Les obus de 88 pleuvent sur Utah. Au regard de la marée, cette photo fut prise dans les 2 premières heures de l’invasion.
Les américains progressent dans le Cotentin.
Pendant ce temps, les unités de reconnaissance poussent vers les terres, et vers 10h30, les premiers éléments de la 4th UD Infantry Division peuvent serrer la main à Pouppeville du Général Taylor, commandant la 101st US Airborne Division et parachuté dans la nuit autour de Ste-Marie-du-Mont. Plus au nord, les GI’s avancent difficilement, du fait que leur zone est inondée et qu’ils doivent donc emprunter les chemins, ce qui nuit à leur déploiement. Néanmoins, les sorties 3, à Audouville la Hubert, et 4, à St-Martin-de-Varreville, sont depuis 8h du matin aux mains du 502th régiment de la 101st Airborne. Sur la sortie 2, la commune stratégique de Ste-Marie-du-Mont et ses habitants voient leurs premiers chars américains envahir les rues vers 14h, au grand soulagement des paras qui de battent depuis 2h du matin pour contrôler le bourg.
Membres du 8th Infantry Regiment, 4th ID, le Jour J sur Utah Beach (US Nationales Archives)
Le premier bilan sur Utah Beach est positif car le nombre de morts sur la plage et le plus bas de l’opération Neptune (197 morts et 60 portés disparus). L’état-major allié avait craint lors du débarquement allié des pertes 10 fois supérieures à ces chiffres.
Utah beach : les soldats débarquent, au 1er plan un canon allemand de 47 mm a été détruit
Au soir du 6 juin, les forces américaines auront déployées sur la plage d’Utah beach 23 000 hommes, plus de 1 500 véhicules de tous genres, et 1 800 tonnes d’approvisionnements. Une fois les objectifs de la journée réussis, il faudra faire mouvement vers le nord de la Manche pour couper et libérer le Cotentin, et enfin prendre le port en eau profonde de Cherbourg. Entre juin et novembre 1944, les habitants de Sainte-Marie-du-Mont verront passer plus de 836 000 hommes et 200 000 véhicules.
Ces prisonniers allemands se restaurent après avoir été capturés