La gazette
Décès d'Eugene Noble, pilote du Snafu Spécial.
Par plagesdu6juin1944 | Le 31/01/2019 | Commentaires (0)
Eugene M. Noble, vétéran du débarquement en Normandie et pilote du C-47 The Snafu Spécial exposé dans la Batterie de Merville, est décédé le 29 janvier 2019 à 96 ans.
Eugene Noble en 2013 (photo : facebook Douglas C-47 #43 15073 "The SNAFU Special)
Il est toujours là, bravant les intempéries et les courants d'air normands. Le Douglas C-47 The Snafu Spécial monte la garde et impose sa haute stature par-delà les barrières de la Batterie de Merville. Le nez au vent, peut-être attend-il désespérément le retour de son pilote, Eugene Noble. Malheureusement, son attente sera désormais tristement vaine, car Eugene n'est plus.
La nouvelle est tombée le 30 janvier via un Tweet du Maire de Merville-Franceville Olivier Paz : " Le dernier pilote du Snafu, Eugene Noble repart au ciel la veille de ses 97 ans."
Le tweet d'Olivier Paz, Maire de Merville-Franceville.
Son avion transformé en bar dans les Balkans.
Eugene Noble était un vétéran du D-Day. Il avait en effet participé à 22 ans au largage des parachutistes américains aux abords de Sainte-Mère-Eglise. Puis à la fin de la Seconde Guerre Mondiale, il avait piloté The Snafu Spécial. Un avion au vécu particulier qui participa à l'opération Overlord, à l'opération Dragoon (débarquement de Provence), à Market Garden (Hollande), vola dans les Ardennes belges puis lors de l'opération Varsity (franchissement du Rhin en mars 1945). Vendu à la Tchécoslovaquie une fois la paix signée, il est reconverti en avion de ligne avant d'être racheté en 1960 par l'armée de l'air française. La Yougoslavie s'en porte ensuite acquéreur en 1972.
Découvert sur la base de Rajlovac par un casque bleu français, il échappe à plusieurs reprises à la destruction et devient à partir de 1994 un bar militaire, le Dakota Club, pour les soldats de l'EUFOR. A compter de 2007, les bénévoles de l’association Merville Dakota vont s'affairer pour restaurer l'aéronef. Et en 2008, le Snafu Special peut être présenté dans la Batterie de Merville.
En juin 2013, Eugène Noble avait alors traversé l'Atlantique pour retrouver son compagnon de vol. Puis en 2014, toujours à la batterie libérée par le 9th Para Battalion, il avait été élevé au grade de chevalier de la Légion d’honneur.
L'affaire Cicéron, bons baisers de Turquie.
Par plagesdu6juin1944 | Le 24/01/2019 | Commentaires (0)
En 1943, un employé de l'ambassadeur Britannique en Turquie transmit des documents secrets, dont un sur Overlord, aux services de renseignements d'Hitler. Sous le nom de code de Cicéron, il fut démasqué, et berné par les Allemands.
La turquie, un enjeu pour les politiques pendant la guerre.
Pendant la Seconde Guerre Mondiale, une bataille obscure et secrète s'est jouée entre les différents belligérants. Une bataille d'espions, un jeu à une, deux, voire trois bandes, une partie de dupes, d'informations et de d'intoxication, où chaque camp essaie de percer à jour les intentions de l'adversaire et de deviner son prochain coup.
Depuis 1943, l'abwehr, les services de renseignements allemands, peuvent compter sur un nouvel informateur dans le camp d'en face, chez les Britanniques. Leur source, dont le nom de code est Cicéron, leur transmet depuis le mois d'octobre et la Turquie des documents sensibles.
La Turquie, pays neutre, est au centre des attentions des alliés et des forces de l'Axe. Churchill, le Premier ministre britannique, y tient beaucoup, contrairement à ses généraux qui rechignent à protéger le pays contre les velléités d'Hitler. Car l'Allemagne a besoin du chrome, élément indispensable à son industrie d'armement, dont la Turquie se trouve être son seul fournisseur.
L'homme de confiance se mue en espion amateur.
Cicéron est en fait Elyesa Bazna, le maître d'hôtel de l'ambassadeur de Grande-Bretagne dans le pays, Sir Hughe Knatchbull-Hugessen. Depuis Ankara, Bazna a réussi à gagner la confiance de Knatchbull-Hugessen, et est surtout parvenu à faire un double de la clé du coffre-fort oubliée par son employeur dans l'un de ses pantalons. Pendant des mois, Bazna photographie le contenu du coffre ou de la mallette diplomatique, clichés top-secret qu'il transmet ensuite à l'ambassade d'Allemagne.
Néanmoins, outre des comptes-rendus de réunions secrètes entre Anglais, Américains et Turques, les services de Von Ribbentrop n’apprennent que ce qu'ils savent déjà sur l'opération Overlord : pas grand chose, à part un nom. Un message parle bien de l'attaque. Mais pas de date ou de lieu précis à se mettre sous la dent pour les Allemands. Et de toute façon, ils ont une confiance plus que limitée dans cet espion, qu'ils pensent être en fait à la solde des services secrets de Sa Majesté. Aussi, après l'avoir remercié pour ses informations dont ils ne feront pas grand-chose, ont-ils pris soin de payer en faux billets les 300 000 Livres Sterling demandés par le domestique.
Elyesa Bazna
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Pendant ce temps, du côté de l'ambassade Britannique, l'atmosphère est à la suspicion. Le gouvernement turc a alerté son homologue anglo-saxon sur la présence d'une taupe dans ses locaux d'Ankara. Bazna échappe à la surveillance de l'Intelligence Service, notamment parce que les Britanniques pensent qu'il est trop stupide pour être le fameux Cicéron, mais la chance de ce dernier tourne. En avril 1944, il est dénoncé par Nelly Kapp, une secrétaire ayant œuvré pour les diplomates allemands.
Bazna parvient à s'échapper de l'ambassade le 30 avril et à s'évaporer dans la foule.
Après-Guerre, l'opération Cicéron devint l'affaire Cicéron, révélée au grand public grâce à la parution en 1949 des mémoires du SS Ludwig Moyzisch, officiellement attaché commercial en Turquie, mais en sous-main un des principaux protagonistes dans cette histoire. La traduction anglaise en 1950 de son ouvrage mit le feu dans les affaires intérieures britanniques, qui se seraient bien passés de la mise en lumière de ces événements.
Cicéron avait vécu, mais Elyesa Bazna n'avait pas dit son dernier mot. Il refit surface après avoir eu affaire à la justice turque pour avoir tenter d'écouler la fausse monnaie payée par l'abwehr. Il osa ensuite intenter un procès à l'Allemagne de l'Ouest, espérant ainsi recevoir l'argent promis pour son travail de renseignements. Il n'obtint pas gain de cause mais publia ses mémoires en 1962 sous le titre Signé Cicéron, puis donna des conférences, avant de décéder en 1970. Interrogé auparavant en 1963 (voir l'interview ci-dessous), il disait avoir agit pour l'argent, mais aussi dans l’intérêt de son pays, la Turquie. Telle fut la rocambolesque histoire d'Elyesa Bazna, l'apprenti agent secret qui devint l'acteur principal d'une affaire d'espionnage qui vira à la comédie.
Pour aller plus loin : Livre L'affaire Cicéron 1943, de François Kersaudy, éd. Perrin.