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Lancement de l'expo C'est le débarquement !
Par plagesdu6juin1944 | Le 15/06/2014 | Commentaires (0)
Jusqu’au 4 janvier 2015, c’est le débarquement au Centre d’Histoire de la Résistance et de la Déportation de Lyon. Rencontre avec le créateur de cette exposition, Antonin Dehays, doctorant en Histoire et ancien étudiant dans la ville des frères Lumière. Mais ne lui dites pas qu’avec ce rendez-vous il contribue au devoir de mémoire.
Antonin Dehays présente l'exposition temporaire C'est le débarquement !
Dans le cadre du 70ème anniversaire du débarquement, le CHRD a décidé d’importer le D-Day dans ses sous-sols. L’occasion pour tous de découvrir une page incontournable de notre histoire contemporaine. Notamment pour ceux qui, habitant loin de la Normandie, sont moins familiers avec le Jour J.
Venu en 2003 à Lyon pour conjuguer sa passion pour l’Histoire et le basket de haut niveau, Antonin Dehays, chercheur indépendant et commissaire de cet évènement, réside aujourd’hui aux Etats-Unis. Ce dernier commente son choix de se délocaliser hors des secteurs du débarquement : « Le CHRD et moi-même avons voulu mettre en valeur le jour J et les 100 jours de combats qui ont suivi, pour les sortir de l’effervescence normande et les importer en région lyonnaise. L’exposition temporaire se déroule à travers l’histoire de 12 soldats et leurs objets personnels. C’est une histoire à hauteur d’homme. Très vite après le D-Day, un vent d’espoir va souffler sur la région de Lyon, même si la ville ne sera libérée que début septembre 1944 ( NDLR : le 3 septembre ). »
Après la construction du Mur de l'Atlantique, passage par les parachutistes américains,
avec l'exposition de la veste de saut de Marvin W. Hegel, à gauche de l'image. (collection privée)
Marvin W. Hegel est originaire de Madison dans l’Illinois. Engagé en mai 1943 dans la 101st Airborne, il saute sur la Normandie le 6 juin 1944 avec la I Compagny, 506th PIR, près de Saint-Côme-du-Mont. Il survit à la Bataille de Normandie mais est mortellement blessé le 6 septembre 1944 lors d’un exercice en Angleterre.
Issus de collections privées ou prêtés par les familles des vétérans, les objets forment le socle exceptionnel de cette manifestation. L’intimité de ces civils ou de ces combattants s’ouvre alors devant les visiteurs. Britannique, Américaine, Canadienne, Française, Polonaise, Allemande, chaque relique inanimée relate l’épopée poignante de son défunt propriétaire. Et l’atmosphère est singulière, lorsque l’on sait qu’en 1944 les civils arrêtés par la gestapo attendaient ici d’être conduits aux étages supérieurs pour y être interrogés. Dernière étape angoissante, camouflée dans les bas-fonds de la ville, seuil autrefois redouté avant les questions et les tortures, les lyonnais y célèbrent aujourd’hui leur liberté*.
"Le devoir de mémoire est mis aujourd'hui à toutes les sauces" |
Avec en entrée la construction du Mur de l’Atlantique, la chronologie des évènements s’expose pour permettre au visiteur de replonger 70 ans en arrière : arrivée des parachutistes le 6 juin, bataille des haies, réussite de l’opération Cobra dans la péninsule du Cotentin, fermeture de la Poche de Falaise fin août 1944. Sans oublier également l’autre débarquement sur les côtes françaises, l’opération Anvil-Dragoon en Provence.
Si cette exposition immersive a pu voir le jour, c’est avant tout grâce à la persévérance et au rapport de confiance qu’Antonin Dehays a su construire avec les familles et les collectionneurs. Mais ne lui parlez pas de devoir de mémoire pour justifier cette expo. « Je ne suis pas un féru du devoir de mémoire. C’est quelque chose que l’on fait peser sur notre génération. Je suis un combattant du travail d’histoire. C’est-à-dire ouvrir un livre, faire la démarche de rencontrer les derniers survivants, collecter des interviews et entretenir le souvenir. Le devoir de mémoire a été inventé par les politiques, et on le met aujourd’hui à toutes les sauces**.»
C’est donc un véritable devoir d’histoire auquel s’est tenue l’équipe du CHRD. Par-delà notre curiosité sur notre passé, on ne peut que se souvenir et s’émouvoir devant ces vestiges. Présentée aux sous-sols d’un lieu enduit par les souffrances, quoi de plus symbolique que de célébrer le courage des hommes entre les murs d’un bâtiment ou résonnèrent les cris de tant de suppliciés. Sous les voûtes d’un noir impénétrable, l’environnement se prête à la prise de conscience, à la réflexion, voir au recueillement.
Veste du Lieutenant Coggeshall Jr. (collection privée)
Chester E. Coggeshall Jr. était pilote aux commandes d’un bimoteur P-38. Le 6 juin 1944, il escorte des bombardiers au-dessus des plages normandes. Puis le 21 juillet, il reçoit un nouvel avion, le P51 Mustang qu’il baptise Cape Cod Express. Malheureusement, le lieutenant Coggeshall est tué le 16 avril 1945 lors de sa 100ème et dernière mission.
Exposition C’est le débarquement, du 12 juin 2014 au 4 janvier 2015, au CHRD de Lyon
Centre d'Histoire de la Résistance et de la Déportation |
Propos recueillis par stephane samson
contact@plagesdu6juin1944.com
* voir notre article du 18 mai 2014
** Dans son livre Sainte-Mère-Eglise, un sanctuaire américain en Normandie 1944-1948, aux éditions OREP, Antonin Dehays exprime ceci page 219 concernant le devoir de mémoire : « La mémoire est par définition vulnérable et sélective. Cette dernière ne retient que les éléments qui valorisent un groupe et son passé, occultant les aspects les moins glorieux. Le terme devoir d’histoire, en revanche induit une approche rigoureuse et globale. »