GI
Livre D-Day un jour noir, d'Yves Corver.
Par plagesdu6juin1944 | Le 26/10/2019 | Commentaires (0)
Le nouveau roman d'Yves Corver, D-Day un jour noir, revient sur l'apport des soldats noirs pour la libération de l'Europe en 1944-45, et plus particulièrement le 320e bataillon de ballons de barrage antiaérien. Un combat mené contre les Allemands, mais aussi contre l'intolérance de leur propre armée.
Port de New York, 16 novembre 1943.
Firmin Bellegarde, un soldat noir américain de dix-neuf ans, originaire de La Nouvelle-Orléans, s’apprête à embarquer sur l’Aquitania en partance pour l’Écosse.
Il fait partie d’une unité noire : le 320e bataillon de ballons de barrage antiaérien. Après plusieurs mois de préparation au Royaume-Uni, le jeune GI débarquera avec de nombreux équipages de ballons le 6 juin 1944 sur les plages normandes d’Omaha et d’Utah.
Le 320ème bataillon de ballons de barrage anti-aérien était en première ligne le Jour J en Normandie. Cette unité spéciale, composée de soldats afro-américains, devait éloigner les avions ennemis. Des ballons en caoutchouc, gonflés à l’hydrogène et rattachés à un treuil par des câbles d’acier, explosaient en cas de contact avec un aéronef. Dans l'enfer d'Omaha Beach, ces hommes arrivent dans la première vague d'assaut aux côtés des 1st et 29th US Infantry Divisions.
C'est cette unité que l'écrivain Yves Corver a décidé de mettre en lumière dans son quatrième roman « D-Day, un jour noir. » A travers les yeux de Firmin Bellegarde, personnage fictif de 19 ans, le lecteur emboîte le pas du 320e bataillon, de son camp d’entraînement dans le Tennessee, jusqu'à la Libération et le retour au pays.
De la traversée de l'Atlantique sur l'Aquitania jusqu'au rivage du Calvados, suivez le quotidien de ce jeune soldat, partagé entre l'avancée de l'armée américaine vers le D-Day et la réalité du racisme et des quolibets subits dans les rangs de cette dernière.
Et en ce matin du 6 juin 1944, chacun comprend aussi que la guerre n'est pas un jeu et que la mort s'est adjugée le sable d'Omaha : « Certains des hommes en arrivèrent à maudire ce satané Higgins qui avait construit ces chalands prétendument insubmersibles et qui n'offraient en outre qu'une protection dérisoire. En dehors de la rampe d'acier à l'avant, à l'épreuve des balles, les flancs étaient faits de contreplaqué peint en gris métal, que les balles des MG42 pouvaient transpercer sans difficulté. »
Le récit d'Yves Corver transpire d'un réalisme et d'une certaine sensibilité, retraçant les épreuves d'un homme et d'une communauté diluées dans l'intolérance d'une armée et les affres de la guerre. Un itinéraire vers et au-delà du Mur de l'atlantique, qui voit s'opposer les cultures : là où les Américains voient ces noirs habillés en treillis, les peuples du vieux continent voient d'abord en eux des soldats à part entière.
Yves Corver (Photo : Y. Corver).
L'auteur explique : « J'ai tenté autant que possible de retracer le parcours de mes personnages principaux au sein de la batterie A, en respectant la réalité historique. (...) J'ai eu à cœur de reproduire le plus fidèlement possible l'ambiance et l'état d'esprit de l'époque, autant dans la société civile que dans l'armée, aux États-Unis, en Grande-Bretagne, comme en France. »
Depuis la Guerre de Sécession, les faits d'armes des soldats afro-américains restaient plutôt confidentiels dans les livres d'histoire. Longtemps stigmatisés par leur hiérarchie, les vétérans noirs retrouvent peu à peu la reconnaissance pour leur contribution dans la victoire contre les forces de l'Axe. Ils sont 143 à reposer sur les hauteurs d'Omaha Beach. Parmi les milliers de croix en marbre hérissant le cimetière militaire américain de Colleville-sur-mer, ils sont une trace indélébile du sacrifice de la communauté afro-américaine pour la libération de l’hexagone en 1944. Et pourtant, les soldats noirs ont longtemps été les oubliés d'une armée restée souvent sourde à leurs mérites.
Afro-américains dans l'armée : une longue attente pour la reconnaissance.
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Durant la guerre civile américaine, des soldats noirs avaient combattu dans les troupes de l'Union afin de gagner leur liberté. Pendant la Grande Guerre, le gouvernement français décora de la Croix de Guerre les 92nd et 93rd Infantry Divisions pour leur courage. Durant la Bataille de Normandie, les soldats afro-américains œuvrèrent sur les ports flottants d'Utah et d'Omaha Beaches, ou édifièrent des hôpitaux et des aérodromes. Les GI's les croisèrent sur le Red Ball Express, lorsqu'au volant de leurs camions ils constituaient le vital maillon du ravitaillement en carburant et en munitions vers les premières lignes. Sans oublier le 761st Tank Battalion, les Black Panthers, qui débarqua sur Omaha le 10 octobre 1944 et ferrailla dans la 3rd Army du Général Patton. Durant la Seconde Guerre Mondiale, 909 000 soldats noirs ont combattu dans les rangs de l'armée américaine. Il faudra attendre 1948 pour que celle-ci mette fin à la ségrégation raciale dans ses rangs.
William Dabney (1924 - 2018), vétéran noir du 320e, avait eu cette phrase en 2009 : "C’est toujours la même question : comment j’ai pu participer à la Libération de la France et rentrer chez moi où je n’étais même pas libre ? "
Une constatation qui nous invite à la réflexion, et que le livre d'Yves Corver traduit parfaitement.
Roman D-Day un jour noir, d'Yves Corver, aux éditions LBS/Fleur sauvage.
A commander sur le site de la boutique du Mémorial de Caen.
Quand le Colonel Taylor haussa le ton sur Omaha.
Par plagesdu6juin1944 | Le 17/07/2019 | Commentaires (0)
Le D-Day, le débarquement américain sur Omaha Beach rencontre les pires difficultés face à la résistance allemande. Contre la déroute qui s'annonce, le Colonel Taylor va haranguer les GI's avec une phrase qui va rester dans l'Histoire.
George A. Taylor en 1945, devenu Brigadier Général.
Face aux allemands tapis derrière le Mur de l'Atlantique, les GI's ont bien du mal à progresser vers les terres, pris sous le feu croisé des MG42 et des mortiers ennemis. En ce 6 juin 1944, la paisible Normandie devient un champ de bataille, et sur ce rivage du Calvados s'amorce la Libération de l'hexagone. Les 1st et 29th US Infantries Divisions viennent de débarquer à 6h30 sur ce secteur appelé Omaha Beach. Seulement la résistance allemande est féroce et les assaillants américains se font tailler en pièces. Les chars amphibies censés les soutenir face aux défenses allemandes ont pour la plupart coulé en mer, emportés par la houle. Afin d'échapper aux balles et obus mortels, les survivants se terrent derrière les obstacles de plage ou tentent de se dissimuler dans les vagues.
Pour le commandant des troupes, le Général Omar Bradley, le constat est terrible. Ces hommes sont cloués sur la plage et ont perdu l'initiative. Les rapports sont alarmistes, la première vague d'assaut accuse 90% de pertes. Bradley hésite à faire rembarquer les survivants et les faire débarquer ailleurs. Puis l'espoir renaît, les navires alliés s'approchent au plus près du rivage et pilonnent les points de résistance allemande. Sur le sable, quelques hommes se dressent contre cette déroute annoncée et remobilisent leurs camarades.
D'abord Taylor, puis Robert Mitchum...
C'est le cas du Colonel George A. Taylor, 16th Infantry Regiment, 1st US Infantry Division. Arrivé dans la 2ème vague à 8h, il observe les événements. Omaha Beach est devenu Omaha la Sanglante. Mais dans la fournaise, face à la sortie E-1, l'officier de 47 ans prononce cette tirade restée dans la légende :
« Deux espèces d’hommes restent sur cette plage : les morts et ceux qui vont mourir ! Foutons le camp d’ici ! »
Sans égards pour sa sécurité, à découvert, le Colonel réorganise ses troupes et regonfle leur moral, permettant aux GI's d'avancer de 300 mètres. Son courage le Jour J lui vaut de recevoir la "Distinguished Service Cross".
Une juste récompense pour Taylor, mais une postérité dont la production du film hollywoodien Le Jour le plus long, pas avare d'erreurs historiques, s'est accommodée. Car dans le film, c'est Robert Mitchum, sous les traits du Général Norman Cota, 29th US ID, qui prononce à tort cette phrase. Aujourd'hui, le cimetière militaire américain, et ses 9 386 tombes hérissées à l'aplomb de la plage d'Omaha, rappellent que la guerre n'est pas un film...
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