La polémique du label "Secteur mythique des plages"
Par plagesdu6juin1944 | Le 21/04/2013 | Commentaires (0)
Six offices du tourisme normands ont décidé de lancer le concept du secteur mythique des plages du débarquement afin de promouvoir le patrimoine laissé par le D-Day. Seulement de par sa conception et ses objectifs, cette idée est loin de faire l’unanimité.
Un organisme existe déjà pour la mise en valeur du littoral normand. Dès le 22 mai 1945, le sous-préfet Raymond Triboulet met en place le Comité du Débarquement. L’objectif est simple : la commémoration par tous les moyens du débarquement de juin 1944. Depuis près de 70 ans, cette association met donc tout en œuvre afin d’améliorer l’accueil du public sur les plages et de mettre en valeur les vestiges d’Overlord ou la venue des vétérans. Enfin le 21 mai 1947, une loi est votée donnant un caractère national aux célébrations des anniversaires du débarquement en Normandie. L’Etat est dès lors responsable de l’organisation de ces évènements. Ainsi la soixantaine de communes témoins du Jour J participent en tant que membres d’honneur de l’association au bon déroulement des manifestations et bénéficient de l’afflux croissant des visiteurs.
Seulement le 8 avril dernier Ouest France brise la quiétude ambiante. En effet le journal local annonce que 6 offices du tourisme, et non des moindres, se regroupent afin de créer le label « secteur mythique des plages du débarquement ». Il faut savoir que les 5 secteurs de la Bataille de Normandie ( Sword, Juno, Gold, Omaha et Utah ) drainent plus de 4.5 millions de visiteurs annuels. Les offices de Bayeux, Courseulles, Isigny-Grandcamp, Omaha, Carentan et Sainte-Mère-Eglise souhaitent donc mettre en place ce label afin d’attirer plus de public, et bien évidement de bénéficier des retombées économiques. Au rayon des activités, outre la promotion sur les réseaux sociaux, le D-Day Festival Normandy avait déjà vu le jour en 2007. Il leurs faudra également mener une réflexion sur l’attractivité de la Normandie après le 70ème anniversaire du Jour J en 2014.
Une initiative qui depuis son annonce suscite de nombreuses critiques. Pourquoi cette idée alors qu'un comité existe depuis de nombreuses années ? Les considérations mercantiles et financières peuvent-elles cohabiter avec l’entretien du souvenir du Jour J ? Les communes ne vont-elles pas perdre leurs charmes et leurs âmes à trop vouloir attirer le chaland ? Et surtout ce secteur mythique n’inclut pas le secteur Sword et une partie de Juno Beach. Une hérésie et un manque de considération pour les vétérans Britanniques.
En orange la zone concernée par le secteur des plages mythiques. En vert le secteur exclu du label
Le 11 avril, Léon Gautier, béret vert vétéran du 6 juin, tire le premier, et se dit « scandalisé par la discrimination. La sueur, le sang versé par les 177 commandos français auraient-ils moins de valeur ? ( … ) Il n'y a pas de secteur mythique, il n'y a qu'un secteur authentique dans l'espace historique de la Bataille de Normandie « ( Ouest France ). La deuxième vague d’assaut arrive le 16 avril. Toujours dans Ouest France, Louis Mexandeau, ex-ministre des anciens combattants, s’indigne à son tour : « Une telle initiative serait aussi une injure faite à la Grande-Bretagne [...] Au nom de quoi et de quelles préoccupations mercantiles, ces six personnages en quête de dollars et ignorant l'histoire décréteraient-ils de ce qui est mythique et de ce qui ne l'est pas ? ».
Enfin le lendemain, d’autres renforts arrivent. L’amiral Brac de la Pérrière, président du Comité du Débarquement, regrette dans le journal La Manche Libre l’oubli du secteur Sword et les motivations commerciales des instigateurs du futur label. De leurs côtés, les élus et les habitants du secteur Sword ne cachent pas non plus leur colère. Et sur le web, les pétitions emboitent les pas des détracteurs.
Quant aux acteurs du secteur mythique des plages, ils ont bien du mal à faire déposer les armes à leurs opposants. Ils assurent que les choses peuvent évoluer concernant l’intégration de Sword Beach. Seulement quand sur France 3 Basse Normandie le 19 avril, Loïc jamin, le président de l'office de tourisme Bayeux Bessin déclare qu’il "ne travaille pas sur la matière historique, mais sur la matière touristique", on se doute que les hostilités sont très loin d’être terminées.
Sources :
Ouest France, La Manche Libre, France 3 Basse Normandie, site web du Mémorial Pégasus
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