5/5 Les fortes têtes du D-Day : James Hill
Par plagesdu6juin1944 | Le 17/08/2017 | Commentaires (0)
Pour ses faits d'armes pendant la Seconde Guerre Mondiale, James Hill fut l'un des officiers le plus décoré. Un combattant humble, mais aussi parfois informel. Et qui reçut la reconnaissance personnelle du Prince Charles.
Les abords du carrefour du Mesnil de Bavent sont bondés en ce 5 juin 2004. Venu pour les commémorations du 60ème anniversaire du D-Day, SAR le Prince de Galles a traversé la Manche et fait déplacer la foule. Le Prince Charles est venu dévoiler une statue érigée en l'honneur d'un membre de la 6th British Airborne Division. Près de la stèle, appuyé sur sa canne, l'autre vedette de cette cérémonie attend son royal compatriote. Son costume sombre est égayé d'une cravate rouge et du béret amarante des troupes d'élite. Légèrement courbé, l'aîné semble porter le poids des ans. Plus que sa rencontre avec le Prince, c'est peut-être le poids de ses décorations ornant sa veste qui le fait s'incliner. En effet, le vétéran affiche un chapelet de médailles à faire passer pour un bleu le plus haut gradé russe.
James Hill, 93 ans, va dans un instant découvrir la statue façonnée à son image, charismatique et bienveillante. Le brigadier esquisse un sourire et sait que pour un instant, il doit remiser au plus profond de son être sa légendaire humilité. Le Prince Charles ne s'y est pas trompé, déclarant à son propos : « Cela peut gêner le brigadier que nous dévoilions une statue de lui aujourd'hui, mais nous sommes également ici pour commémorer le sacrifice de ceux qui sont morts. Beaucoup avaient le même âge que mes fils. »
Le Brigadier James Hill en 2004. (Pegasus Archives/Mark Hickman) | Il est ici en compagnie de la Princesse Elizabeth pendant une visite à la 6th Airborne le 19 mai 1944. (IWM) |
"Le facétieux général sort un ballon de football sur lequel est dessiné à la peinture fluorescente la tête d'Hitler." |
Le 6 juin 1944, sa 3rd Brigade doit sécuriser le flanc Est des secteurs de Débarquement. A compter de minuit et demi, les Red Devils de Hill ne vont pas chômer : faire taire la batterie de Merville, détruire les cinq ponts sur la Dives, et s'emparer d'une crête. Tout cela avant l'arrivée de l'infanterie sur les plages à 6h30. Dans sa tâche, Hill peut compter sur ses troupes composées des 8th et 9th Para Battalions, du 1st Canadian Para Battalion, du 3rd Para Squadron Royal Engineers et du 224th Para Field Ambulance.
Le 6 juin, avant 6h30, les objectifs sont remplis. Et la résistance commence. James Hill y revient : « Sur les crêtes, ma brigade était confrontée à la 346. Panzergrenadier Division, équipée de tanks, de canons auto-portés et de sa propre artillerie. Nous étions grandement en infériorité numérique et sans canons. (…) La bataille (NDLR : de Bréville-les-Monts) commença le 8 juin, et les combats firent rage pendant 6 jours. (…) C'était grâce à notre capacité à repousser les limites de l'endurance humaine, que nous étions devenus invincibles, et capables de repousser une division d'élite largement supérieure en nombre. Ma brigade, à la fin de la bataille, avait perdu 1 200 officiers et soldats tués, blessés et disparus, mais nous avons gagné une victoire vitale. »
Avant-guerre, il est un sportif accompli, et ses qualités physiques lui valent le surnom de Speedy. Après la retraite de Dunkerque, il est l'un des premiers à se porter volontaire pour les troupes aéroportées Britanniques. Lieutenant-colonel en 1942, il commande le 1st Para Battalion et commence à bâtir sa légende. Dès novembre, son unité effectue un saut de combat en Tunisie et capture la ville de Beja. Fédérateur, l'officier enrôle sur place une vingtaine de tirailleurs sénégalais et commence à mener une guérilla contre les forces de l'Axe. En patrouille, Hill découvre trois chars italiens enterrés. Misant sur la relative envie d'en découdre des occupants des blindés, et accompagné du Capitaine Whitelock, il toque sur la tourelle d'un d'entre eux et ordonne leur reddition. Les italiens obtempèrent, le para pense avoir gagné son pari. Mais dans le troisième char, le dernier ennemi n'est pas du même avis. Il jaillit de l'engin et ouvre le feu sur Hill et Whitelock. Ce dernier prend une balle dans le visage et le cou. Hill est frappé par trois fois en pleine poitrine. Les Red Devils voient rouge et envoient ad patres le tankiste récalcitrant à coups de baïonnettes, puis transportent leurs officiers au poste de secours. Le capitaine Robb joue du bistouri et les deux blessés ont finalement la vie sauve. Hill tient le lit pendant sept semaines dans un hôpital d'Alger. Le général Giraud lui rend visite, et l'honore. L'officier français prend la Légion d'Honneur sur l'uniforme de son aide de camp et l'épingle sur le pyjama de son homologue britannique.
Son retour en Angleterre permet ensuite à Hill de recevoir le Distinguished Service Order. Et en avril 1943 , le voilà à la tête de la 3rd Parachute Brigade. Ses hommes profitent pleinement de son exigence, mais aussi de sa décontraction. Dans la nuit du 6 juin 1944, au-dessus de la Manche, la tension monte dans les avions qui les transportent vers le Calvados. Le facétieux général sort un ballon de football sur lequel est dessiné à la peinture fluorescente la tête d'Hitler. Une fois au sol, pour se retrouver dans la pénombre, les troopers américains sont munis de criquets. Lui a fait distribuer à ses hommes des appeaux à canard, histoire de mieux voler dans les plumes allemandes. Ainsi, on entend les paras cancaner dans la campagne normande. En matinée, des Spitfires se méprennent et ouvrent le feu sur son groupe. Hill est touché. Opéré, il refuse d'être évacué et reprend son commandement. Les contre-attaques allemandes s’enchaînent autour de Bréville. Pistolet au poing, il entraîne le 12 juin un assaut avec des canadiens et des sapeurs, stoppant ainsi l'ennemi au château Saint-Côme. Et ajoute de fait une bar à son DSO. Pour le plus grand bonheur de ses hommes, Hill resta en charge de la 3rd Brigade jusqu'au terme de la Seconde Guerre Mondiale.
Il quitta l'armée en 1948, mais resta très actif auprès des associations d'anciens combattants et de familles de parachutistes. Pour son courage au front, le Brigadier James Hill avait reçu le Distinguished Service Order with two bars, la Military Cross, la Légion d'Honneur, la Silver Star (USA), et la Croix de la Liberté du Roi Haakon VII (Norvège).
Décédé deux ans après l'inauguration de sa statue au carrefour du Mesnil, il avait dit ceci lors de la cérémonie « Mes pensées sont de la gratitude pour tous ceux qui ne sont pas revenus. Nous ne les avons pas oubliés. Je pense à tous ceux qui sont revenus en toute sécurité. »
La stèle en bronze a depuis été déplacée dans le paisible parc du Mémorial Pégasus de Ranville. Désormais, elle côtoie l'authentique pont levant de Bénouville. Désormais, deux monuments du D-Day se font face.
Sources :
Mémorial Pégasus de Ranville
Livre Paras Britanniques, d'Olivier Richard
Livre Diables rouges en Normandie, de Georges Bernage
The Guardian, article du 06/06/2004
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