parachutiste
Le père Maternowski le 6 juin 1944, pour lui sonne le glas.
Par plagesdu6juin1944 | Le 01/03/2019 | Commentaires (2)
Le D-Day, dans un petit village du Cotentin, un aumônier parachutiste s'inquiète du sort des blessés au milieu des combats. Mais la guerre va en décider autrement...
Patch du 508th PIR.
Depuis 2016, elle est fixée là, dans Gueutteville, noire comme le deuil. Sur cette plaque du souvenir, dessinées en arrière-plan, des vaches précèdent un planeur Waco. Devant, un homme est agenouillé auprès d'un corps recouvert d'un drap. Aux guêtres fixés à ses mollets, on devine qu'un GI repose inerte sur le pré normand. Au-dessus du malheureux, l'autre homme lui rend les derniers sacrements à l'aide d'une bible et s'appuie sur un casque marqué d'une croix latine blanche. En tenue de parachutiste, ce dernier arbore sur son épaule gauche le patch au double A, signe distinctif des membres de la 82nd US Airborne Division.
Cette sérigraphie est placée là en souvenir du Capitaine Ignatius Maternowski, chaplain du 508th PIR. Elle est placée là, à l'endroit même où il fut tué.
Dans la nuit du 5 au 6 juin 1944, l'aumônier de 32 ans accompagne les parachutistes américains de la 82nd dans leurs missions dans le Cotentin, en arrière du futur secteur d'assaut Utah Beach.
Dans l'avion qui lui fit traverser la Manche, s'était-il rappelé son engagement en juillet 1942 ? Regrettait-il de s'être porté volontaire pour incorporer une nouvelle arme, l'aéroportée et son 508th Parachute Infantry Régiment ? Après un entraînement rigoureux avec les Red Devils, il atteignit le rang de capitaine.
Le franciscain Ignatius Maternowski (find a grave).
Le Jour J, près de Picauville, un planeur s'est écrasé à proximité et a fait de nombreuses victimes. Le père Maternowski commence à s'occuper des parachutistes et des victimes du crash de l'appareil.
Arrivé à Gueutteville, il s'est réfugié dans le café Thouroude avec plusieurs blessés, tandis que les allemands du Grenadier-Regiment 1057, 91. Infanterie-Division, sont postés à l'autre bout du hameau. Contre l'avis de Jules Thouroude, le chaplain sort alors de son abri pour aller seul à leur rencontre, ceci afin de négocier la mise en sécurité des blessés des deux camps. Tôt dans la matinée, il part sans armes vers les lignes ennemies, portant au bras gauche un brassard marqué d'une croix rouge. Et bientôt, les témoins sont surpris de le voir revenir avec à ses côtés un officier ennemi. Le Major allemand pénètre dans le café épicerie et constate les soins aux victimes.
La mort au bord du chemin.
Le prêtre raccompagne ensuite son visiteur au-dehors, puis s'en retourne pour retrouver ses ouailles. Soudain, un coup de feu claque. L'homme d’Église s'écroule. Un tireur vient de le foudroyer d'une balle dans le dos. Étendu sur le sol, la tête sur le bord du ruisseau bordant le chemin, la Bataille de Normandie vient de se terminer dès le 6 juin pour le chaplain. Les snipers allemands interdisant toute approche, son corps restera là pendant trois jours, en bord de route, jusqu'au 9 juin.
Enfin, les troupes américaines avancent vers l'Ouest. Les allemands se replient et le corps de l'aumônier peut être relevé par des membres de la 90th US Infantry Division. Il est enterré près d'Utah Beach, puis en 1948, son corps est transféré aux États-Unis, au cimetière Mater Dolorosa dans le Massachusetts.
Aujourd'hui dans Gueutteville, un petit mémorial placé au bord de la chaussée rappelle les événements. Qu'aux premiers bruissements de notre libération, un homme essaya d'immiscer un peu d'humanité au milieu des combats. Et qu'il paya cette compassion de sa vie.
La stèle édifiée à l'endroit où le père Maternowski s'est écroulé le 6 juin 1944.
Lacey Tingle, le soldat enfin reconnu
Par plagesdu6juin1944 | Le 16/11/2018 | Commentaires (0)
74 ans après avoir été inhumés, les restes d'un membre inconnu de l'armée Britannique ont été identifiés. Le para Lacey Tingle a pu recevoir une nouvelle pierre tombale en juin 2018, en présence de membres de sa famille restés dans l'attente de ses nouvelles depuis 1944.
74 ans plus tard, la famille de retour en Normandie
Ce sont des dizaines de sépultures particulières qui jalonnent les cimetières militaires du Calvados, des stèles sans nom de combattant. Une deuxième mort pour ces soldats restés à jamais sous le pré normand, laissant leurs familles à leurs questions et à un deuil difficile. Ils sont donc là, ces soldats inconnus, portés disparus pour l'armée et leurs proches. Néanmoins, les différents services des sépultures des cimetières continuent depuis la fin de la guerre leur travail d'identification. Et ces enquêteurs, aidés de passionnés, parviennent à glaner quelques victoires.
Ainsi le 7 juin dernier, une émouvante cérémonie s'est déroulée au cimetière militaire britannique de Ranville dans le Calvados. Margaret Keighley, 96 ans, son fils Paul et sa fille Zoe Smith se dressent au milieu des allées de la nécropole. Margaret, accompagnée de ses enfants, est venue se recueillir sur la tombe de son frère Lacey, soldat enfin reconnu. Après un travail de fourmi, un nom a enfin pu être mis sur les restes de l'homme qui était inhumé ici à Ranville depuis plus de 70 ans.
Le cimetière militaire de Ranville
Tué le 6 ou 7 juin 1944
Le 6 juin 1944, les alliés se jettent à l'assaut du Mur de l'Atlantique et lancent l'opération Neptune. Le private Lacey Anthony Tingle, 29 ans, est parachuté en arrière du secteur Sword Beach avec la 6th British Airborne Division. Membre du 224th Parachute Field Ambulance, Tingle a atterri près du village de Douville-en-Auge. Son groupe constitué de parachutistes britanniques et canadiens est encerclé par les allemands. Les échanges entre les belligérants sont vifs entre les 6 et 7 juin, et lors de la bataille, neuf membres du groupe perdent la vie. Ces parachutistes sont inhumés dans le village par les habitants, avant d'être transférés au cimetière militaire de Ranville après-guerre. Parmi ces neuf malheureux figure Lacey Tingle, non identifiable et dont la tombe est marquée du sceau "A SOLDIER OF THE 1939 1945 WAR."* Quant à sa famille, elle reçoit un courrier l'informant que Lacey est Missing in action. Une absence qui va durer 74 ans. Le nom de Lacey Tingle est gravé à Bayeux sur le Mur des soldats du Commonwealth tués au cours de la Bataille de Normandie et n'ayant pas reçu de sépulture.
La persévérence d'un français et d'un anglais
Jusqu'au jour où deux chercheurs, Ludovic Louis et un ami anglais, soumettent après trois ans d'enquête des preuves concernant sa localisation à la CWGC (Commonwealth War Graves Commission). Le Ministère de la défense Britannique entreprend des recherches supplémentaires pour corroborer la découverte du corps de Tingle, finalement confirmée.
Le soulagement et la reconnaissance étaient donc de mise pour sa sœur Margaret ce 7 juin à Ranville : « J'ai été totalement surprise lorsque j'ai reçu la lettre nous informant que la dernière demeure de Lacey avait été trouvée. Je ne pouvais pas croire que cela soit possible après 74 ans. [… ] Ainsi, il est très réconfortant de pouvoir visiter sa tombe et enfin se dire au revoir. Je suis extrêmement reconnaissante à tous d'avoir rendu cela possible. "
Sur la nouvelle stèle de son frère retrouvé, Margaret a fait inscrire : "GREATER LOVE HATH NO MAN THAN HE WHO LAYS DOWN HIS LIFE FOR HIS FRIENDS."** A Bayeux, le Mur des disparus s'est délesté d'un nom. Il en reste encore 2091 gravés dans la pierre.
Lacey Tingle était un instituteur objecteur de conscience qui s'est porté volontaire pour être médecin dans la 6th Airborne.
La CWGC a prêté au Memorial Pegasus la pierre tombale originale qui va être exposée au musée. (photo : Mémorial Pégasus)
*Un soldat de la guerre 1939 1945
** Il n'y a pas de plus grand amour que celui qui donne sa vie pour ses amis